Un peu de Paris
Dans les années 50, les autobus à plate-forme avaient des grands
nez qui s’ouvraient de chaque côté pour accéder au moteur. On en voyait
d’ailleurs souvent en panne et les chauffeurs, les manches relevées,
occupés à trifouiller dedans pour les réparer.
Lorsqu’on les
ratait on les coursait pour attraper la plate-forme, située à
l’arrière, en espérant qu’il n’y aurait pas une brutale accélération
juste au moment d’attraper la barre puis, en équilibre, on décrochait
la chaîne de sécurité, recouverte de cuir, pour accéder à la
plate-forme, en général un passager bienveillant le faisait pour nous.
Tout ça pendant que le contrôleur, à l’intérieur, oblitérait les
billets avec sa moulinette posée sur le ventre. Il y avait, à l’entrée
de la plate-forme, une chaîne suspendue avec une poignée en bois, comme
celle des chasses d’eau, reliée à la cabine du conducteur par un câble
en acier.
Depuis cette plate-forme ouverte on voyageait en
regardant Paris. Les monuments et les immeubles étaient noirs de
pollution. La loi André Malraux qui obligeait les propriétaires et les
pouvoirs publics de ravaler les bâtiments n’existait pas encore. La
crasse s’accumulait par ce que dégageaient les moteurs rustiques,
souvent une épaisse fumée noire, et les chaudières à charbon. A
l’époque, on ne parlait pas de pollution. Paris était sale, c’était
normal et on le trouvait beau quand même. Il n’y avait aucune gestion
ou presque de la circulation. Les sens interdits étaient rares et les
voitures circulaient naturellement dans les deux sens provoquant
souvent des embouteillages monstres. Ils était plus difficile de
circuler avec dix fois moins de voitures qu’aujourd’hui. Seuls les
policiers essayaient de régler la circulation à certains carrefours.
C’était une belle pagaille !